Désinformation : les fausses nouvelles se répandent en ligne sur fond de coup d'État au Burkina Faso
- Par Nicola Morrison
- BBC Monitoring
Un coup d'État militaire visant à renverser le gouvernement a eu lieu au Burkina Faso le 23 janvier 2022.
Après une longue période d'agitation et de coups de feu, les périmètres de la résidence présidentielle dans la capitale burkinabé Ouagadougou ont été violés et le président, Roch Marc Christian Kaboré, a été arrêté.
L'agitation, qui a entouré le coup d'État, et les manifestations qui l'ont précédé, ont conduit à la mise en ligne de plusieurs contenus trompeurs et de fausses informations.
Une vidéo publiée le 22 janvier, montrant une scène chaotique de manifestants burkinabé se heurtant à des responsables militaires, prétend être une séquence d'une manifestation du weekend qui a précédé le coup d'État.
Cependant, les images qui ont attiré 118 000 vues sur Facebook datent en fait de plus de sept ans et sont issues du soulèvement burkinabé de 2014.
Au lendemain du coup d'État, on ignorait beaucoup de choses sur l'opération militaire qui a permis de capturer le président, notamment la manière dont il était assiégé et le lieu où il était détenu. En conséquence, de nombreux utilisateurs des réseaux sociaux ont eu recours au journalisme citoyen pour combler les lacunes de l'information, ce qui a entraîné la mise en ligne de plusieurs récits erronés.
Sur Twitter, plusieurs messages sur les réseaux sociaux font référence à l'homme sur l'image ci-dessous comme étant le leader du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration, le Lt. Col. Paul-Henri Sandaogo Damiba. Cependant, le jeune officier représenté a en fait été vu la semaine dernière à la télévision d'État en train d'annoncer que les militaires avaient suspendu la constitution et dissous le gouvernement au Burkina Faso, mais il n'a pas prétendu être le chef de l'opération.
Le véritable leader du coup n'a fait de déclaration publique que le jeudi 27 janvier.
Un autre utilisateur de Twitter fait une publication, prétendant être une image du chef du coup d'État militaire, qui est en fait une capture d'écran d'une vidéo du lieutenant Isaac Zida, un officier militaire qui a brièvement été chef d'État par intérim du Burkina Faso, faisant un discours pendant les troubles de 2014.
Plusieurs rapports en ligne ont été publiés au lendemain du coup d'État, selon lesquels le général Gilbert Diendéré (qui fait l'objet d'un procès pour le meurtre de Thomas Sankara et a été condamné pour la tentative de coup d'État de 2015) avait été libéré de la prison militaire. L'information était fausse.
Un communiqué militaire, daté du 26 janvier 2022 et signé par le procureur militaire indique : "des informations publiées dans certains médias et sur les réseaux sociaux prétendent que le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) a libéré le général Gilbert Diendere". Il poursuit : "l'auditeur militaire dément formellement cette allégation et rassure le public que le général Gilbert Diendéré est toujours détenu à la Maison d'arrêt et de correction des armées (MACA) et qu'aucun détenu n'a été libéré."
Cette désinformation pourrait avoir des ramifications politiques, car l'actuel chef du coup d'État, le Lieutenant-Colonel Damiba, était considéré comme un allié de l'ancien président Blaise Compaoré, évincé lors du soulèvement de 2014 et actuellement en exil en Côte d'Ivoire.
Diendéré et Compaoré sont des alliés. Damiba voulait mener un contre-coup d'État contre Diendéré et a témoigné dans le procès pour la tentative de coup d'État de 2015.